Arts visuels

|

Delphine Deguislage

Delphine Deguislage met en scène les membres d’un corps de femme, à la fois tout puissant et morcelé, en parallèle avec des objets utilitaires ou domestiques, des fragments architecturaux détournés ou réinterprétés. Souvent choisis pour leur fonction et/ou leur symbolique, ils concentrent des intensités. Posés, exposés, ils semblent se réapproprier un espace à la fois physique et mental. 

Ce que l’artiste nous propose dans son œuvre est une expérience plus qu’une démonstration. C’est le corps qui s’empare de l’art plutôt que l’art qui s’empare du corps. Le formalisme est physique ; l’anthropomorphis-me, féminin ; l’objet, corporalisé ; l’espace, habité.

A l’opposé du commen-taire, ce qu’elle donne à voir n’est ni une provocation, ni une revendication à portée politique immédiate. L’artiste ne dénonce pas, elle s’arrange.

Elle « fait avec » des réalités de divers ordres : celles de la physicalité des matériaux et des objets, celle du corps en interaction avec  l’espace dans lequel il est « placé ».

Dans ses installations, c’est un dispositif de dialogue qui se dessine : des souvenirs, des impressions, des ambiances, des intensités, des formes, des images choisies avec une attention très personnelle. Les multiples esthétiques que l’artiste manie avec précision sont moins des références historiques ou stylistiques que des moyens de créer des connexions (plutôt que des confrontations). Ou peut-être des sortes de fusions, entre l’abstraction et l’anatomie humaine, entre le privé et le public, entre la froideur des matériaux et l’organique des formes, entre l’utilité ou la fonction d’un objet et son potentiel esthétique, entre le présent et le passé.

Ces compositions/recompositions s’emploient à donner vie à « quelque chose » qui relierait des éléments apparemment disparates. Ni nostalgiques, ni autocentrées, elles n’évoquent pas plus la reconstitution d’un drame à élucider ou un secret à deviner, même si l’artiste donne des indices biographiques, des pistes. Elles rassemblent, elles mettent en rapport des repères, ou peut-être les personnages d’une histoire qui se déroulerait quelque part… un quelque part pluridimensionnel, entre un passé revisité, un corps, des objets, et l’espace physique dans lequel ils sont exposés.

Extrait du texte de Fabienne Audéoud, mai 2016.

 

Vue de l’exposition de groupe avec Fabienne Audéoud et Anne-Lise Coste, W#1 à Vic-Le-Fesc, janvier 2017.

De gauche à droite :

SANS TITRE (je suis la femme), laine brodée sur toile de jute, 135 / 195 cm, 2017.  

POISON, moulage en plâtre synthétique et filet vide poche, 30 x 18 x 5 cm, 2015 (edition de 5 + 2 AP)

PORTE-PAROLE, moulages en plâtre synthétique, pigments et huile, taille du corps, 6 éléments uniques, 2013

 Vue de l’exposition personnelle « Toute puissante » à la galerie Mélanie Rio, Paris, septembre 2015.     A gauche : L’ENFANT, jesmonite et fibre de verre, 120 x 30 x 30 cm, 2015

A droite :

JE T’AI TOUJOURS AIME, moulage en plâtre synthétique, bois, huile, papier peint, mdf, 50 x 50 x 210 cm, 2015