Arts visuels

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Centre culturel de Marchin

4 Place de Grand-Marchin - 4570 Marchin

www.centreculturelmarchin.be

Nicolas Kozakis et Raoul Vaneigem, Refuge nomade Désire tout, n’attends rien, acier inoxydable, 240 x 270 x 150 cm, 2016. Photo : Jacky Lecouturier

C’est depuis 1994, c’était, ça ne s’invente pas, un jour de Saint-Sylvestre, que le Centre culturel de Marchin propose des expositions d’art plastique selon une « même direction » – une direction étant le fait de celui ou ceux qui dirigent, mais aussi et surtout une orientation. Suffisamment claire, même si elle n’est pas rectiligne. Autrement dit un sens, là encore au double sens du mot ; car s’il n’a rien à expliquer, il va ou devrait aller de soi que l’art a quelque chose à dire. De nos vies et de nos sociétés, de nos difficultés et de nos fragilités, du vaste monde et de la proximité.

Pour l’exprimer autrement encore, la ligne des expositions du Centre culturel s’est moins attachée à des disciplines, moins encore à des chapelles ou à des grands noms, qu’à certaines valeurs. On pourrait les nommer (être ou exister, en passant par la relation, la révélation, la recherche de fraternité, de tendresse) ; mais il est éventuellement plus porteur encore de les laisser sous-entendre, de les aborder par le sensible plutôt que par l’intelligible ou par la rhétorique.

Sûrement l’art est-il à la fois ce qui peut apaiser et ce qui ne se tient, et ne nous laisse, jamais tranquille. Ces questionnements, faits d’incertitudes et de rapprochements, ont pu se décliner sous de multiples initiatives : en dialogue avec le formidable paysage rural du Condroz ; en collaboration avec ses habitants (dont les lieux de vie mêmes accueillent souvent des manifestations artistiques, expositions, spectacles ou moments d’échanges) ; en partenariat avec différentes institutions (une des déclinaisons récentes est la création du « Pavillon des arts » avec l’Athénée royal de Marchin) ; en harmonie avec la vie sociale, quotidienne : installation d’un certain nombre d’œuvres, spontanées ou de commande, dans l’espace public ; et en brouillant les prétendues frontières symboliques entre culture élitiste et populaire.

Nos modestes dimensions, notre positionnement géographique, un certain sens de la convivialité, de l’intimité, une priorité au point de jonction de l’art et de l’art de vivre, tout cela nous permet aussi de ne pas avoir à prendre parti vis-à-vis d’effets de mode ou de genre, ou de débats trop théoriques. De miser sur une forme de fraîcheur voire de naïveté, particulièrement ouverte à la singularité des talents émergents.

Le fond de notre entreprise ne revendique pas absolument la nouveauté ; et dans sa forme, les dimensions d’accessibilité, de connivence ou de perméabilité demeurent fondatrices, essentielles. L’art alors permet un partage : entre les artistes (générations ou communautés linguistiques confondues, par exemple) ; entre les visiteurs ou avec les habitants ; et en lien avec l’implantation territoriale du Centre culturel.

Chercher le jaillissement, écho à des coups de cœur et à un engagement, est en soi une prise de position, et tente de renouer avec le mystère même de l’œuvre. Il n’est peut-être pas très « actuel », car cela nous ferait remonter à Hegel, voire à l’esthétique platonicienne, d’estimer que le beau est un éclat du vrai ; c’est pourtant là une évidence ou une conviction qui peuvent durablement guider, tout comme peut guider, sur les pas et selon les propos de Laurent Busine, de considérer qu’est actuel, au sens le moins restrictif du terme, ce qui est à même de nous toucher aujourd’hui. De nous toucher là où nous sommes. Et, si possible, de nous emmener un peu plus loin, de nous ouvrir à un ailleurs… Ce qui est à la fois une bien modeste et une très exigeante ambition.